Zawya ou la renaissance du cinéma d’auteur au Caire
15 nov. 2019
Comme pour les artistes, l’entrée se fait côté jardin, derrière la rue Talaat Harb, dans une allée piétonne. C’est à dire à l’opposé des portes du cinéma Odéon, qui diffuse toujours pour l’essentiel des films égyptiens mainstream et des blockbusters hollywoodiens. Le néon aux couleurs de Zawya, tout comme la voiture garée à côté du café en plein air et sur le pare-brise de laquelle sont diffusées des images de film, confirment au visiteur qu’il est bien arrivé.
Une salle pour cinéphiles
On doit le projet Zawya, qui signifie « perspective », à Marianne Khoury, nièce du réalisateur Youssef Chahine. Lancé en 2014, ce projet redonne ses lettres d'or au cinéma… pour le plaisir des cinéphiles du Caire. Le prix du ticket est volontairement bas (20 livres égyptiennes). Le cinéma est équipé d'un café très agréable. Décoré de vieilles affiches de cinéma, il propose pop-corn et boissons à des prix accessibles à tous. La salle en elle-même offre 150 places.Une programmation pointue
Le premier film projeté dans la salle de Zawya a été le Wadjda de la saoudienne Haifaa al-Mansour, nommé aux Oscars en 2014. Ont suivi L’image manquante de Rithy Panh, Le passé d’Asghar Farhadi et Mommy de Xavier Dolan. Chaque film est à l’écran pour une semaine en moyenne, plus en cas de gros succès, à raison de plusieurs séances par jour (milieu, fin d’après midi et soirée). La programmation respecte une alternance entre films arabes et films européens, documentaire et fiction, long métrage et court métrage.La principale difficulté pour l’équipe de Zawya, est d'attirer un public peu habitué à fréquenter les festivals de films indépendants. Pari parfois réussi grâce notamment à la programmation de films d’auteur égyptiens. Ainsi de Al khoroug el nahar, premier long métrage de la réalisatrice Hala Lotfy. Sorti en 2012, il raconte l’histoire d’une jeune femme qui s’occupe de ses parents malades dans un quartier pauvre du Caire, au rythme d’Oum Kalthoum. Quand un réalisateur est présent pour débattre à la fin de la projection, la salle fait là encore salle comble.De nouveaux projets
Il règne en Égypte un véritable climat de méfiance politique vis-à-vis des grandes institutions culturelles du centre-ville. Cela a par exemple conduit à la fermeture surprise de la galerie d’art Townhouse et du théâtre Rawabet. Pourtant, Zawya est jusqu'ici passé entre les gouttes. Et cherche même à développer ses activités. D’abord avec des matinales organisées dans d’autres cinémas du Caire pour les publics scolaires. Ensuite avec une projection hebdomadaire au cinéma Amir d’Alexandrie. C’est le film jordanien Theeb du réalisateur Naji Abu Nagar, qui a ouvert le bal en novembre 2016. L’équipe de Zawya espère transformer l’essai en lieu de diffusion permanente de films d’auteur.Le projet s’inscrit dans une séquence dynamique pour les films alternatifs en Égypte. On a ainsi assisté à la naissance en 2011 du Festival du Film Africain de Louxor, sous l'impulsion du scénariste et dramaturge égyptien Sayed Fouad. Au Caire, on voit aussi le développement de l’ambitieux Cimathèque, un lieu où expositions, salles d’archives et de projection, sont consacrées au cinéma de la région et d’ailleurs.Contact
Zawya - Art House Cinema Cinema Odéon, 4 Abdel Hamid Said St off of Talaat Harb St. Downtown, Cairo 01283200888