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Un peu de vin vaut mieux pour moi que le royaume De tous les rois défunts et mieux que tous leurs trônes
Ainsi s’exprimait le grand poète perse Omar Khayyam, dont les Rubaiyat ont éclipsé avec le temps ses talents de mathématicien. Ses quatrains formant autant d’hymnes à l’amour et au vin, c’est sans surprise que l’on retrouve son turban et son nom sur les bouteilles du vin le plus distribué au Caire : « le » Omar Khayyam. Certains l’accuseront de maux de tête accablants, d’autres préféreront se souvenir des belles soirées que ce vin, rouge ou blanc, a accompagné depuis les toits du Caire. Mais quoiqu’on pense de son bouquet, derrière ce nom, se cache celui moins connu des vignes Gianaclis.
Les riches heures d'un vignoble égyptien
Figurant parmi les quelques vignes que compte l’Égypte, le domaine Gianaclis se situe dans le Delta du Nil. On le doit au commerçant grec, Nestor Gianaclis. Ce dernier choisit le site pour sa proximité avec le port d’Alexandrie, et la combinaison parfaite qu’offre le climat chaud et sec du désert avec les crues annuelles du Nil. Les vignes Gianaclis irriguèrent les grandes heures de l’Égypte et de son âge d’or ; celles des nuits blanches, celles des grandes voix, celles des cinémas mythiques, à cette époque lointaine où il n’était pas mal vu de boire au Caire.
Des hauts et des bas
Bien qu’on boive encore beaucoup dans la capitale, la pratique se veut discrète. Les licences d’alcool tendent à se réduire comme peau de chagrin avec les années. Le site des vignes lui-même est entouré de villages, où vivent des femmes couvertes de noir, dans la plus pure tradition conservatrice.Les vignes Gianaclis tiennent encore debout, malgré tout. On peut même dire qu’elles ont retrouvé des couleurs. Sous Nasser, en effet, les rares vignes du pays ont été nationalisées. Des militaires à la retraite en héritèrent et le moins qu’on puisse dire est qu’ils n’avaient pas à cœur de produire de grands crus. Rapidement, la réputation des vignes Gianaclis décroît, et devient la risée des amateurs de vin. Égyptiens et étrangers confondus déplorent l’apparition de cette infâme piquette qu’est devenu le vin égyptien,. La nationalisation s’étire de 1966 jusqu’à la fin des années 1990. Sous l’impulsion de Moubarak, le pays s’ouvre alors à nouveau au privé, dans un élan libéral.Mais la réputation d’un domaine est plus facile à défaire qu’à faire. Pendant quelques temps, la situation des vignes Gianaclis ne semble pas radicalement altérée. C’est là qu’intervient le deuxième personnage clé de l’affaire : David Molyneux-Berry. Ce célèbre consultant de vin, auparavant commissaire priseur chez Sotheby’s, s’est installé en Égypte à la fin des années 1990. Il a épouse une Égyptienne et il est le père de deux fils qui ont grandi en Égypte. Celui qui peut se vanter d’avoir goûté quelques bouteilles de la cave des Romanov et qu’on appelle à la rescousse dans les plus grands litiges de ce petit milieu de privilégiés qu’est le marché du vin, s’est naturellement penché sur la question de la production locale.
Le renouveau des vignes Gianaclis
C’est ainsi que David Molyneux-Berry devient consultant pour Gianaclis, aidant la marque à reconstruire son image en Égypte. Il conçoit notamment des visites guidées des vignes en petits groupes au départ du Caire. Molyneux-Berry anime lui-même la visite. Cette dernière débute par une passionnante conférence inaugurale sur le vin en Égypte. et le vin en général. Après la visite des locaux, tout le monde se retrouve pour une longue dégustation.Le Omar Khayyam est loin d’être le seul vin de la gamme proposée par Gianaclis. Il reste en revanche le plus abordable. Les productions comprennent également des vins dont les grappes ont été importées d’Afrique du Sud (Cape Bay) et de la région de Bordeaux (Château de Granville). Gianaclis propose également un vin pétillant blanc ou rosé (Valmont) et même, bientôt, un whisky !